Histoire du Tibet, Rapport Sénat 2012
Chronologie 1949 - 2004
Autrefois, le Tibet était une nation distincte et libre avec son propre gouvernement, sa religion, sa langue, ses lois et ses coutumes. Les premières traces historiques d'un Etat tibétain remontent à 127. Pendant les trois siècles suivants, le Tibet a été une des plus grandes puissances d'Asie. Au cours des siècles, plusieurs pays ont voulu contrôler le Tibet dont la Chine, la Grande Bretagne, la Mongolie, sans succès. Entre 1911 et l'invasion chinoise de 1949, le Tibet était un pays totalement indépendant.
Octobre 1950 | entrée des troupes chinoises à Lhassa, capitale du Tibet. |
23 mai 1951 | signature à Pékin, sous la menace, d'un plan en 17 points, dit accord de libération pacifique du Tibet, qui scelle le « retour » du royaume himalayen dans « la mère-patrie » chinoise. Cet accord fait croire aux tibétains que le système déjà existant au Tibet ne sera pas remis en question mais stipule en fait l'intégration du Tibet à la Chine. |
1954 | le Dalaï Lama, chef spirituel et temporel des Tibétains, est reçu par Mao Tsé-toung pour signer la constitution chinoise qui proclame que le Tibet fait partie intégrante de la Chine. |
10 mars 1959 | début d'un soulèvement contre l'occupation chinoise qui s'achèvera dans un bain de sang, avec des milliers de victimes tibétaines. Fuite du Dalaï Lama en Inde, où un gouvernement en exil sera formé à Dharamsala. |
1965 | Pékin crée la « Région Autonome du Tibet ». |
1966/76 | révolution culturelle : 98% des monastères sont détruits, à Pékin, 600 tonnes d'objets artisanaux tibétains en métaux précieux sont fondus et les religieux persécutés. Pékin ne rétablira les droits à l'exercice de la religion qu'en 1980. |
1978 | le Dalaï Lama se dit prêt à retourner au Tibet s'il est convaincu que les Tibétains sont heureux sous l'administration chinoise. La Chine se déclare disposée à oublier la « trahison » du chef spirituel et à l'accueillir de nouveau. Offre renouvelée maintes fois par la suite. |
1979/84 | le Dalaï Lama est autorisé à envoyer quatre missions d'enquête au Tibet entre 1979 et 1983. Parallèlement, des délégations politiques tibétaines se rendent à Pékin en 1982 et 1984. En 1983, la Chine exclut que le chef spirituel tibétain puisse obtenir un poste de responsabilité au Tibet après son éventuel retour. |
1986 | les négociations sur le retour du Dalaï Lama achoppent notamment sur le fait que Pékin exige qu'il s'engage à résider à Pékin et non à Lhassa. |
1987/1988 | manifestations antichinoises à Lhassa violemment réprimées. En juin 1988, le Dalaï Lama propose de laisser Pékin contrôler les affaires étrangères et la défense du Tibet en échange d'une autonomie interne. Proposition restée sans suite. |
28 janvier 1989 | mort du 10e Panchen Lama, le plus haut dignitaire bouddhiste resté en Chine. |
8 mars 1989 | Pékin impose la loi martiale à Lhassa après trois jours d'émeutes antichinoises qui font plusieurs dizaines de morts. |
octobre 1989 | le Dalaï Lama obtient le Prix Nobel de la Paix. |
1990 | le chef tibétain préconise la création d'une confédération sino-tibétaine, abandonnant ainsi ses revendications indépendantistes. |
1992 | ouverture du Tibet au monde extérieur pour promouvoir son économie. |
1995 | début d'une controverse sur la 10e réincarnation du Panchen Lama : pour la première fois dans l'histoire du bouddhisme tibétain, Pékin intervient directement dans le choix du Panchen Lama en désignant un garçon de six ans et en plaçant en résidence surveillée l'enfant reconnu par le Dalaï Lama, dont on est toujours sans nouvelles 9 ans plus tard. |
1996 | le Dalaï Lama propose des négociations sans conditions sur l'avenir du Tibet, une proposition à laquelle Pékin oppose la reconnaissance au préalable de la souveraineté chinoise sur le Tibet. |
1997 | le président chinois Jiang Zemin demande au Dalaï Lama de déclarer que le Tibet a toujours été une « partie inaliénable de la Chine » et en fait une pré-condition à un dialogue, rejetée par le Dalaï Lama. |
10 mars 1998 | le Dalaï Lama accuse la Chine de « génocide culturel », à l'occasion du 39e anniversaire du soulèvement antichinois. |
juin 1998 | Pékin déclare disposer de plusieurs « canaux de communication » avec le Dalaï Lama avec lequel le dialogue est officiellement rompu depuis 1993. |
7 mars 1999 | les autorités chinoises, par le biais d'un long commentaire de l'agence Xinhua (Chine Nouvelle), lancent une attaque en règle contre le chef spirituel tibétain, l'accusant notamment d'être le principal responsable des troubles sociaux au Tibet. |
1999 2004 | la colonisation se poursuit inexorablement. Les transferts de colons chinois continuent et l'objectif du gouvernement chinois est d'atteindre les 15 millions de colons chinois au Tibet en 2020. Aujourd'hui, les « canaux de communication » sont rompus entre Pékin et le Dalaï Lama. Ce dernier continue de prôner la voix de la non-violence comme résolution du conflit, malgré une pression de plus en plus forte de certains tibétains demandant l'indépendance totale, même au prix de la violence. |
2008 avant et après les J.O. de Pékin | Aujourd'hui, au Tibet, les 6 millions de Tibétains sont soumis à une brutale répression imposée par Pékin. Rien qu'à Lhassa, 45.000 soldats seraient venus renforcer les troupes locales. Depuis peu, les patrouilles se multiplient et des snipers ont même pris position autour du Temple principal (Jokhang). Pékin craint des réactions populaires après l'échec de toutes les négociations avec les envoyés du Dalai Lama. Le Tibet (5x France en surface) est la "plus grande prison au monde": le régime chinois n'y respecte aucun des droits humains fondamentaux. La torture est systématique, parmi bien d'autres cruautés (ex: récits écrits/vidéo de Palden Gyatso, de Ama Adhe, et d'autres anciens prisonniers politiques). Désormais 14 leaders chinois sont en ligne de mire de la Justice espagnole pour "génocide sur le peuple tibétain" (entre 1950-2006) et pour "crime contre l'humanité envers le peuple tibétain" (2008). En 2008, les premières victimes furent les courageux Tibétains qui se sont sacrifiés depuis le 10 mars, pour rappeler au monde les souffrances endurées par leur peuple.Le bilan humain est toujours impossible à faire, en raison du black-out sur le Tibet. Ainsi, encore aujourd'hui au Tibet:
Le 10 mars 2008, les manifestations ont commencé(*) à partir du monastère de Drepung près de Lhassa. Beaucoup de laïcs ont ensuite pris le relais, à Lhassa et partout au Tibet, et même en Chine. Le Dalai Lama disait: "Partout dans les trois régions du Tibet, les citoyens tibétains ont montré leurs profondes souffrances et leur désespoir, en faisant preuve d'un grand courage. Ce n'était pas seulement des religieux. Il y avait notamment parmi eux des fonctionnaires du gouvernement et des étudiants, y compris ceux de l'Université Centrale des Minorités à Pékin." Des milliers de religieux ont été arrêtés ou ont disparus. Les monastères les plus actifs - comme Kirti, Drepung, etc. - sont toujours encerclés par les forces de l'ordre. Avec interdiction pour les moines et les nonnes d'en sortir sans autorisation, et obligation de subir d'odieuses séances de "re-éducation patriotique", aux relents de révolution culturelle, etc. Principales raisons du Soulèvement exceptionnel de la population tibétaine en 2008 au Tibet :
Echec de la stratégie de la "voie médiane" Le Dalai Lama avait proposé en 1988, devant le Parlement Européen, de ne plus revendiquer l'indépendance du Tibet en échange d'une "autonomie relative" à l'intérieur de la Chine: option dite de la "voie médiane". Les 4 et 5 novembre 2008, les envoyés du Dalai Lama ont rencontré des responsables politiques chinois. C'était la 8e entrevue depuis 2002, et la 2ème en 2008 après celle de juillet. Le compte rendu des Tibétains sera connu le 17 nov. 2008 à Dharamsala. Ce 10 novembre, le pouvoir chinois a déclaré officiellement que les récentes discussions à Pékin avec les émissaires du Dalaï Lama avaient échoué – en imputant bien sûr la faute aux Tibétains - indiquant que Pékin ne ferait "jamais de concession" sur le statut de la région, ne serait-ce qu'une "semi-indépendance". En fait, la stratégie chinoise a toujours été de faire croire, hors de Chine, qu'un dialogue avait lieu avec les Tibétains... Sans jamais rien accorder; en jouant la montre en attendant la mort du Dalai Lama (pariant sur la déstabilisation des Tibétains et une perte d'audience internationale); tout en transférant, chaque jour, encore plus de Chinois au Tibet, surtout depuis 2006 avec le train Pékin-Lhassa qui facilite aussi la récupération des minerais du Tibet et le déploiement rapide de l'armée chinoise. Le 25 oct. 2008, le DL avait d'ailleurs déclaré, en public, ne plus croire à la possibilité d'aboutir à une solution avec les leaders chinois actuels: "Difficile de communiquer avec des gens qui ne croient pas à la vérité. J'ai dit clairement que je croyais toujours au peuple chinois, mais que ma foi dans le gouvernement chinois s'amenuise de plus en plus." En ajoutant "Jusqu'à présent, nous avons choisi un chemin qui n'a eu aucun effet sur notre objectif principal, qui est d'améliorer la vie des Tibétains au Tibet. Maintenant, il n'y a plus de raison de suivre le même chemin sous prétexte que c'est celui que nous avons suivi..." Aussi, le Dalai Lama – âgé de 73 ans, de santé fragile - a décidé de repenser sans tarder la stratégie de lutte des Tibétains, en impliquant ses compatriotes exilés dans une réflexion sur les alternatives possibles. A condition d'être non-violente, aucune option n'est exclue, notamment la revendication légitime de l'indépendance du Tibet, que réclament des mouvements non-violents comme le Tibetan Youth Congress (congrès de la jeunesse tibétaine; la principale organisation non-gouvernementale tibétaine), Students for a Free Tibet (Etudiants pour un Tibet Libre), de nombreux intellectuels et activistes tibétains, etc. Actions :
Seuls, les Tibétains ne réussiront pas. La clef se trouve dans la détermination des citoyens des pays libres à vouloir défendre et promouvoir leurs valeurs de liberté et de respect des droits de l'homme, en pressant leurs propres représentants politiques. Et c'est en Chine (aujourd'hui sous le joug d'une dictature nationaliste) que ces valeurs, défendues par un petit nombre croissant de Chinois au courage exceptionnel (Hu Jia, Liu Xiaobo , etc.) - doivent l'emporter coûte que coûte. Pour une démocratie un jour à Pékin. Le Tibet est sans doute la "métaphore de notre liberté"écrit Claude Levenson dans son livre 'Tibet, la question qui dérange'. La Cause tibétaine est la nôtre. A nous de réagir, maintenant. Le temps joue contre les Tibétains, le peuple chinois et nous tous! |